Situation plus que préoccupante de l’opposition au Rwanda

Situation plus que préoccupante de l’opposition au Rwanda

Lettre ouverte au Président en exercice de l’Union Africaine (Click here to read English version)

Son Excellence Alpha Condé
Président en exercice de l’UA
Roosvelt Street (Old Airport Area) W. 21 K. 19
P.O. Box 3243 Addis Abeba
ETHIOPIE

Le 11 septembre 2017

Objet : Situation plus que préoccupante de l’opposition au Rwanda

Votre Excellence,

Le Réseau International des femmes pour la démocratie et la paix a l’honneur de vous interpeller concernant le harcèlement politique des femmes. Une fois de plus, une femme est arrêtée simplement parce qu’elle exerce son droit d’expression politique. En effet, tout a commencé le mercredi 6 septembre 2017 lorsque 10 membres du parti FDU (parti de Madame Victoire Ingabire Umuhoza, déjà en prison depuis le 14 octobre 2010, condamnée à 15 ans de prison ferme) et un membre du parti PDP Imanzi (parti de Déogratias Mushayidi, condamné à perpétuité) ont été arrêtés, a savoir Boniface Twagirimana, Léonille Gasengayire, Fabien Twagirayezu, Alphonse (employé), Julien (cuisinier), Théophile Ntirutwa, Evode Mbarushimana, Norbert Uwamahoro, Gratien Nsabiyaremye + le chauffeur, et Jean-Marie Kayumva (PDP Imanzi).

Parmi ces personnes arrêtées figure une femme, Léonille Gasengayire, trésorière adjointe des FDU et qui s’est dévouée pour apporter un repas chaud à Madame Victoire Ingabire Umuhoza en prison. Il n’y a pas une semaine que nous avions interpellé le Secrétaire général des Nations Unies quant au piétinement des objectifs du Programme «Transformer notre monde: le Programme de développement durable à l’horizon 2030 », programme des Nations Unies, qui est une suite logique

Nations Unies (ie tous les pays membres) se sont engagées, notamment en ce qui concerne l’autonomisation des femmes à « parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles ». Le gouvernement rwandais qui se targue d’avoir le plus grand nombre en Afrique, sinon au monde, de femmes parlementaires, reste sans paroles lorsqu’il s’agit d’en persécuter certaines d’entre elles, juste parce qu’elles ne sont pas en phase avec le pouvoir. Madame Léonille Gasengayire rejoint la liste, déjà très longue, de femmes n’ayant pas le droit d’exercer leurs droits d’expression politiques. Et comme le hasard fait bien les choses, Mme Gasengayire est membre du bureau politique des FDU (Forces démocratiques unifiées), parti de Mme Victoire Ingabire Umuhoza.

Le Président Kagame est-il réellement préoccupé par l’autonomisation des femmes ?

« Près de 60% des membres du Parlement rwandais sont des femmes et Kagame est régulièrement louangé pour l’autonomisation des femmes. Mais cela n’est guère plus convaincant que son résultat électoral de 99% … » – Anne Garrison.

Nous sommes intimement convaincues maintenant que le gouvernement rwandais veut bien autonomiser les femmes, à condition qu’elles véhiculent le message du pouvoir. Or, autant Victoire Ingabire Umuhoza, Léonille Gasengayire, Iragena Illuminée (portée disparue) et Diane Rwigara ne veulent pas s’inscrire dans cette ligne tracée par le pouvoir. Leur péché commun est de développer un esprit critique. L’arrestation du bureau des FDU à Kigali prive Mme Ingabire de son repas quotidien et de toute visite. Ce qui enfreint son droit inaliénable à la sûreté.

Monsieur Kagame aurait tout intérêt à profiter des idées de ces femmes puisque les idées plurielles sont constructrices plutôt que destructrices. Ce qui devrait inquiéter Mr Kagame, par contre, c’est que ses services lui ont menti sur le nombre de personnes qui ne souhaitaient pas le changement de la Constitution en 2015, lui permettant de se faire réélire jusqu’en 2034. Seulement dix personnes n’étaient pas d’accord avec cette idée de changer la Constitution, selon les autorités. La pratique vient de nous prouver le contraire : les personnes raflées dans l’affaire Rwigara, annoncé de dix personnes qui n’étaient pas en faveur du changement de la Constitution.

Votre Excellence,

Nous vous supplions d’user de votre pouvoir pour arrêter cette moquerie du pouvoir de Kigali vis-à-vis de son peuple aujourd’hui mis à genoux. Un mort de plus au Rwanda est un mort de trop.

Faites que ce Panafricanisme, qui vous est si cher, devienne une réalité. Les pays africains doivent faire en sorte qu’ils ne soient pas la risée de leurs pairs en prenant des actions qui mettent leurs peuples sur les chemins de l’exil. Que reste-t-il comme autre choix aux peuples dont les droits les plus élémentaires sont bafoués ?

Veuillez agréer, Votre Excellence, toute notre considération.

Perpétue Muramutse, RifDP au Canada (sé)
Marcelline Nyiranduwamungu, RifDP en Belgique (sé)
Gloria Uwishema, RifDP aux Pays-Bas (sé)

Copie pour information

– Commission de l’Union européenne
– Missions diplomatiques et consulaires à Kigali, Rwanda
– Gouvernements africains